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Vaccination de la communauté transgenre du Népal

Au Népal, un système rigide d'identification (homme ou femme) empêchait de nombreux membres de la communauté transgenre du pays de recevoir le vaccin contre la COVID-19. Un groupe d'activistes travaille avec le gouvernement pour faire changer les choses.

  • 17 mai 2022
  • 4 min de lecture
  • par Chhatra Karki
Membres de la communauté LGBTQI du district de Rupandehi après leur injection de vaccin.  Crédit photo :  Anik Rana.
Membres de la communauté LGBTQI du district de Rupandehi après leur injection de vaccin. Crédit photo : Anik Rana.
 

 

Anik Rana, membre de la communauté transgenre du district de Rupandehi au Népal, est heureuse d'avoir reçu les deux doses du vaccin contre la COVID-19. Rana fait partie des 75 % des membres de la communauté transgenre de Rupandehi à avoir reçu les deux doses.

Même si le gouvernement népalais a largement distribué les vaccins contre la COVID-19, il n'a pas été facile pour les personnes transgenres du pays de se faire vacciner.

« Il fallait absolument vacciner les membres de la communauté transgenre. Nous avons donc lancé une campagne spécifique à leur intention. Nous leur avons installé des box de vaccination dans la salle de réunion municipale. Nous avons également ajouté une colonne Autres sur les carnets de vaccination. »

Anik Rana
Anik Rana

Leur angoisse a commencé avec la classification binaire institutionnalisée des genres. Les cartes de vaccination comportaient une case à cocher, une pour les hommes et une pour les femmes. La case Autres, terme utilisé pour désigner la communauté transgenre au Népal, n'a été ajoutée que bien plus tard. L'hésitation face à la vaccination qui en a résulté chez les membres de la communauté transgenre a constitué un obstacle majeur à leur vaccination.

Carnet de vaccination d’une personne LGBTQI. Photo credit: Anik Rana
Carnet de vaccination d’une personne LGBTQI.
Crédit photo : Anik Rana

« Les personnes transgenres hésitent à se faire connaître comme telles, notamment à cause de la pression familiale et de la pression sociale. Les slogans en faveur de l’égalité des genres sont très en vogue, mais les personnes transgenres sont toujours victimes de discrimination dans mon district », déplore Rana.

Ce qui a le plus perturbé Rana, c'est le manque de tact des bénévoles chargés de la vaccination à l'hôpital provincial de Lumbini, face à la communauté transgenre. « L’attitude des agents de santé n’a fait qu’amplifier le malaise de cette population, déjà angoissée par nature », reconnaît Rana.

Une campagne de sensibilisation et la coopération des autorités locales ont permis d'améliorer la situation.

« Il y a là une leçon très importante. Il est désormais évident que lorsqu’elles s’impliquent elles-mêmes pour sensibiliser la société, les personnes transgenres peuvent jouir de leurs droits et se faire respecter », déclare Rana, soulignant que la vaccination est un droit pour chaque citoyen.

Rana espère que les membres de la communauté transgenre vont pouvoir recevoir une dose de rappel.

Gauri Nepali, de la Fédération népalaise des minorités sexuelles et de genre (FSGMN), partage cet avis : « Les membres de la communauté transgenre sont angoissés et mal à l'aise lorsqu'il s'agit de montrer leur carte d'identité, car elle est différente de celle des autres personnes », explique-t-il.

« Même s’il leur était possible de s’inscrire en ligne, ce qui permet à tout le monde de s'inscrire facilement, il leur fallait néanmoins montrer leur carte d'identité dans le box de vaccination, ce qui les angoissait à l'idée d'être jugés.

« Le Département des services de santé du district a organisé une rencontre avec les membres de la communauté transgenre pour les aider à surmonter leur réticence », explique Gauri Nepali.

Les longues files d'attente, le sentiment d'insécurité ou d’angoisse et l'impossibilité d'obtenir le vaccin en raison de problèmes liés au genre ou à l'identité constituent également un problème majeur.

Bhumika Shrestha, militante LGBTQI+ et membre de la Blue Diamond Society, organisation qui s'efforce activement d'aider la communauté transgenre dans plusieurs districts du Népal, notamment à Nepalgunj, dans le district de Rupandehi et à Dhangadhi – déclare : « De nombreux membres de la communauté transgenre ont toujours la mention "homme" ou "femme" sur leurs documents, ce qui ne rime à rien ».

« Dans tout le Népal, environ 900 000 personnes LGTBQI+ ont pris contact avec notre organisation, et la plupart d'entre elles ne souhaitent pas se faire connaître par peur d'être rejetées par la société. »

Au Népal, seulement 174 membres de la communauté transgenre ont obtenu du Bureau administratif du district des documents d'identité mentionnant leur appartenance à un troisième genre.

Au début, le gouvernement ne leur avait pas accordé la priorité pour la vaccination ; mais les membres de la communauté transgenre ont fini par recevoir l'aide de différentes organisations gouvernementales et non gouvernementales.

« Par exemple, les membres transgenres qui n'avaient pas de papiers ont été vaccinés grâce à l'aide de Maiti Nepal [organisation à but non lucratif qui aide les victimes de la traite des êtres humains] », ajoute Shrestha, qui a coordonné la vaccination de plus de 500 personnes transgenres.

Keshav Bhattarai, inspecteur de la santé publique dans la municipalité de Tilottama, dans le district de Rupandehi, au Népal, expose les demandes des membres de la communauté LGBTQI+ : ils souhaitent que les groupes minoritaires comme le leur soient considérés comme prioritaires pour la vaccination.

Keshav Bhattarai, inspecteur de la santé publique dans le district de Rupandehi, au Népal. Crédit photo : Anik Rana
Keshav Bhattarai, inspecteur de la santé publique dans le district de Rupandehi, au Népal.
Crédit photo : Anik Rana

« Compte tenu de la vague d'hésitation face à la vaccination, il était impératif de vacciner les membres de la communauté transgenre. C'est pourquoi, en réponse à leur demande, nous avons lancé une campagne qui leur était spécialement dédiée. Nous leur avons installé des box de vaccination dans la salle de réunion municipale », explique M. Bhattarai. « Nous nous sommes également coordonnés avec les différentes organisations et avons inclus une colonne Autres dans leurs carnets de vaccination. »

Un membre de la communauté LGBTIQ+ de la municipalité de Tilottama, district de Rupandehi. Crédit photo : Anik Rana.
Un membre de la communauté LGBTIQ+ de la municipalité de Tilottama, district de Rupandehi.
Crédit photo : Anik Rana.