Lutter contre la poliomyélite sauvage en Afrique australe : une approche sensible au genre

La poliomyélite qui avait resurgi brutalement au Malawi et au Mozambique a été stoppée officiellement au bout de deux ans. Les interventions intégrant la dimension de genre se sont avérées particulièrement efficaces – voici comment.

  • 7 octobre 2024
  • 3 min de lecture
  • par Global Polio Eradication Initiative (GPEI)
Vaccination contre la poliomyélite au Malawi - 24 mars 2022 – Crédit : OMS/AFRO
Vaccination contre la poliomyélite au Malawi - 24 mars 2022 – Crédit : OMS/AFRO
 

 

L'épidémie de poliomyélite due au virus sauvage qui avait éclaté au Malawi et au Mozambique et frappé de paralysie neuf enfants entre février et août 2022 a été stoppée, et déclarée officiellement terminée le 14 mai 2024. Le virus, issu d’une souche présente au Pakistan, n'a pas réussi à s’implanter dans la région africaine.

Cet incroyable succès a été possible grâce aux efforts inlassables des professionnels et des autorités de santé de cinq pays : Malawi, Mozambique, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe. En deux ans, ils ont réussi, avec le soutien de l'Initiative mondiale pour l'éradication de la poliomyélite (IMEP), à atteindre plus de 50 millions d'enfants dans le cadre de campagnes de vaccination massives et coordonnées, et à mettre en place 15 nouveaux sites de surveillance des eaux usées, ce qui a permis de détecter rapidement toute trace de circulation du virus de la poliomyélite et d’intervenir aussitôt.

Mais ce n'est pas tout. À chaque étape du processus, ils ont tenu compte des normes, des rôles et des modes de relation fondés sur le genre qui peuvent aussi bien déterminer l’accès des agents de santé aux familles que guider la décision de faire vacciner les enfants. La reconnaissance et la prise en compte de ces nuances à tous les niveaux –de la planification des campagnes de vaccination jusqu’à l’administration du vaccin - ont permis de protéger tous les enfants contre cette maladie dévastatrice.

Par exemple, au Malawi, le programme a établi un partenariat étroit avec le ministère chargé de l’égalité des genres pour intégrer un nouvel outil qui avait été déployé pour la première fois lors de la pandémie de COVID-19 : le système d'évaluation rapide de l'égalité des genres (Rapid Gender Assessment Tool). Cet outil, qui sert à analyser séparément l’effet des maladies sur les femmes et sur les hommes, et plus particulièrement les groupes défavorisés (notamment celui des femmes vivant dans les zones rurales), permet de s'assurer que les approches et les interventions menées en riposte aux épidémies offrent la même protection à tous. Les enseignements fournis par cet outil se sont révélés très précieux lors de l'épidémie de poliomyélite sauvage qui a frappé l’Afrique australe.

Pour s'attaquer aux barrières culturelles qui entravent l'accès à la vaccination, le ministère de l’Égalité des genres et l'IMEP ont adopté une stratégie qui tenait compte des spécificités de chaque genre. S’appuyant sur l'outil d'évaluation rapide et les données obtenues lors de la pandémie de COVID-19, cette stratégie a permis de lever les principaux obstacles. Il s'agissait notamment de veiller à ce que les projets prennent en compte les différents besoins et les différents rôles des hommes et des femmes au sein des communautés, et de suivre les taux de vaccination de chaque genre, afin d'identifier et de corriger toute disparité entre les garçons et les filles.

Pour pouvoir accéder à tous les foyers, les équipes de vaccination se sont pliées aux coutumes locales tout en respectant la parité hommes-femmes. L’organisation de réunions communautaires sur les marchés, dans les écoles et dans les centres de santé locaux a favorisé le dialogue aussi bien avec les hommes qu’avec les femmes, et permis que toutes et tous soit informés et puissent participer aux campagnes de vaccination.

Reconnaissant l'importance d'une approche axée sur les données, l'équipe nationale a mis au point de nouveaux formulaires de suivi et de notification pour améliorer la collecte des données. Ces formulaires ont permis de recueillir des informations sur le genre non seulement des enfants vaccinés, mais aussi des équipes de lutte contre la poliomyélite travaillant à tous les différents niveaux, y compris à la prise de décision, à la mise en œuvre, au suivi et à la supervision de la campagne de vaccination.

Ces approches, qui mettent l'accent sur l'égalité des genres, ont permis au programme de progresser considérablement dans la lutte contre le virus de la poliomyélite dans toute l’Afrique australe.

Le Malawi, le Mozambique et de nombreux pays luttent encore contre une autre menace, un variant du virus de la poliomyélite. Tant que le poliovirus existera, sous quelque forme que ce soit, tous les enfants seront en danger. Les outils et les tactiques utilisés en riposte à l'épidémie de poliomyélite sauvage seront extrêmement utiles pour les pays qui s'efforcent d'éradiquer définitivement toutes les formes du virus.


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Cet article a été initialement publié par l'IMEP le 12 juin 2024.