Du scepticisme à l’engouement : les Béninois se laissent convaincre et embrassent la vaccination contre la COVID-19

Un an après assouplissement des mesures restrictives, le Bénin affiche une situation épidémiologique encourageante grâce à une politique interne et au recul mondial du virus. La mobilisation de toutes les composantes de la société pour une vaccination massive est au cœur de cette amélioration. Les autorités visent à vacciner un maximum de personnes pour maintenir la stabilité épidémiologique.

  • 16 juin 2023
  • 6 min de lecture
  • par Ginette Fleure Adande
Une personne vaccinée contre la COVID-19 montre sa carte de vaccination.
Une personne vaccinée contre la COVID-19 montre sa carte de vaccination.
 

 

Alors que de nombreux pays du monde étaient durement touchés par le coronavirus, le Bénin a enregistré son premier cas positif en mars 2020. Il s'agissait d'un ressortissant burkinabè âgé de 49 ans en visite dans le pays. Après ce premier cas, des personnes contaminées ont été recensées dans les villes et les campagnes, ce qui a poussé le gouvernement béninois à prendre des mesures fortes pour limiter les dégâts. En plus des nombreuses restrictions, le gouvernement a rejoint les mécanismes COVAX, convaincu que "le vaccin reste un moyen efficace" dans la lutte contre une telle pandémie.

Cependant, à la fin novembre 2021, la couverture vaccinale était faible, avec seulement 347 270 personnes ayant reçu une première dose de vaccin et 265 501 personnes complètement vaccinées, soit 3,64 % de la population, alors que l'objectif était d'atteindre au moins 40 % de la population. Face à cette situation peu encourageante, les autorités ont mobilisé les forces de l'ordre et de sécurité, les chefs religieux et dignitaires, les enseignants, le personnel soignant, les conducteurs de taxi-motos, les crieurs publics, les chefs de quartier et de village, ainsi que les médias pour renforcer la campagne de vaccination.

« Grâce à cette technologie, 17 types de vaccins sont conservés efficacement dans notre centre de santé, et ce sont ces vaccins fiables qui sont administrés aux enfants. »

Les résultats sont au rendez-vous : la couverture vaccinale actuelle est de 34,71 %, avec 2 917 305 personnes complètement vaccinées, selon les chiffres du ministère de la Santé. La vaccination est ouverte aux personnes de 18 ans et plus et a récemment été étendue aux personnes de 12 ans et plus. Comme dans de nombreux pays, la campagne de vaccination rencontre encore quelques résistances. Cependant, les séances de sensibilisation ont permis de convaincre de nombreuses personnes qu'il n'y avait rien à perdre à se faire vacciner pour leur propre sécurité et celle des autres.

Seule arme contre le virus

Charbel Ananou, un opérateur économique, faisait partie de ceux qui avaient boycotté la vaccination après avoir lu sur Internet des témoignages de personnes se plaignant des effets secondaires. Mais aujourd'hui, il fait partie des près de trois millions de Béninois entièrement vaccinés. "J'avais même reporté tous mes voyages parce que je savais qu'il fallait passer par la vaccination. Mais en tant que diabétique et hypertendu, il était essentiel de me protéger. C'est ce qui m'a poussé à me faire vacciner, et je suis heureux d'avoir été convaincu par mon médecin traitant et les déclarations médiatiques du ministre de la Santé", a déclaré cet homme de 51 ans.

Comme Charbel Ananou, de nombreux hommes et femmes avaient longtemps ignoré la campagne de vaccination au Bénin. Jusqu'à fin décembre 2022, Odette Amoussou, commerçante au plus grand marché du Bénin, faisait partie de ceux pour qui la vaccination était "un plan visant à réduire la croissance démographique en Afrique". Mais en mars dernier, lorsqu'elle a eu l'opportunité de voyager en Turquie pour affaires, elle a dû se faire vacciner. Elle reconnaît qu'elle avait plus peur que de mal. "J'ai souffert de la tuberculose par le passé, alors je suis méfiante envers tout. Mais avec l'aide des médecins, j'ai compris que grâce au vaccin, j'ai moins de chances de développer une forme grave de la maladie", a-t-elle souligné.

Des méfiances persistantes

En septembre 2021, le Bénin a connu son troisième pic avec au moins 1800 cas de contamination et en moyenne 6 décès par semaine. Cela a motivé l'accélération des séances de sensibilisation en faveur d'une vaccination massive de la population, "la seule arme de protection contre la pandémie", selon le ministre de la Santé, Benjamin Hounkpatin.

La couverture vaccinale pourrait être encore plus importante si la désinformation et le complotisme au sujet de la COVID-19 n’étaient pas si présents. Malheureusement, il existe également au Bénin des zones hostiles à toute forme de vaccination qui ne permettent à aucune équipe vaccinale d'y accéder : malgré l'implication des notables, des chefs traditionnels et des autorités municipales, les taux de vaccination restent résolument bas.

André Oussou Todjè, maire de la commune de Sô Ava, un village lacustre situé à quelques kilomètres de Cotonou, déplore que certains habitants sont difficiles à convaincre, surtout lorsqu'il s'agit de vaccination ou de méthodes contraceptives. "Comme il s'agit d'une zone où le taux de natalité est élevé, ils voient toute vaccination comme un stratagème visant à limiter le nombre d'enfants qu'ils peuvent avoir", a-t-il déclaré.

Gertrude Azon, une vendeuse de poisson de 34 ans et mère de cinq enfants enceinte de son sixième, reconnaît l'existence de la COVID-19, mais elle a reçu des fausses informations sur les vaccins et la manière dont ils pourraient affecter sa fertilité. "Je me ferai vacciner après mon accouchement. Mais si mon mari veut avoir un autre enfant, je ne pourrai pas refuser. Si je ne peux plus avoir d'enfants, mon mari prendra une autre femme et je ne veux pas ça", craint-elle.

Le gouvernement ne baisse pas les bras et continue de collaborer avec les pouvoirs décentralisés pour vacciner le plus grand nombre de Béninois. À cet effet, tous les responsables, qu'ils soient du secteur privé ou public, sont invités à se faire vacciner et à recommander la vaccination à leurs employés.

Bien que les mesures restrictives aient été assouplies en raison de la stabilité de la situation épidémiologique, certaines d'entre elles sont maintenues pour assurer la sécurité et la protection de la population. Il s'agit notamment de :

  • L'obligation de porter un masque à bord des transports en commun.
  • L'obligation vaccinale pour le personnel médical et paramédical, les pharmaciens, les aides-soignants, le personnel administratif des établissements de santé publics, les employés du secteur privé et ceux des pharmacies.
  • L'accès aux hôpitaux pour les parents et les accompagnateurs est soumis à la présentation d'un pass vaccinal. Le port du masque est recommandé dans les espaces publics tels que les boutiques, magasins, supermarchés et marchés. Le lavage régulier des mains à l'eau et au savon, ou leur désinfection avec du gel, reste obligatoire pour tous.

La vaccination reste ouverte à toutes les personnes éligibles. L'entrée sur le territoire béninois est conditionnée par la présentation d'un test PCR négatif datant de moins de 5 jours ou d'un test antigénique négatif datant de moins de 72 heures.