Les campagnes de vaccination d’urgence réduisent la mortalité de près de 60 %, selon une étude
Une étude de modélisation inédite montre que les vaccinations réactives ont permis d’éviter des millions d’infections et de milliards de pertes économiques.
- 7 août 2025
- 4 min de lecture
- par Linda Geddes

Les campagnes de vaccination d’urgence menées en réponse à des flambées épidémiques ont permis de réduire de près de 60 % la mortalité liée aux maladies entre 2000 et 2023, selon les données disponibles.
Elles ont également généré au moins 32 milliards de dollars américains de bénéfices économiques pour les pays concernés, en évitant des décès ainsi que des années de productivité perdues en raison de handicaps.
« Cette étude démontre que les programmes de vaccination réactive sont efficaces pour réduire l’impact sanitaire et économique des épidémies de maladies évitables par la vaccination », soulignent les auteurs.
Répondre aux épidémies
Les flambées de maladies évitables par la vaccination – telles que la rougeole, la fièvre jaune, le choléra ou la méningite – restent une menace constante dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire, mettant à rude épreuve des systèmes de santé souvent fragiles.
Face à ces crises, les campagnes de vaccination réactive – appelées programmes de vaccination d’urgence en réponse aux épidémies – constituent un rempart essentiel.
Depuis 2000, ces interventions ont permis d’éviter 5,81 millions d’infections, 327 000 décès et 14,6 millions d’années de vie ajustées sur l’incapacité (DALYs).
C’est pourquoi Gavi, l’Alliance du Vaccin, finance des stocks mondiaux de vaccins contre le choléra, l’Ebola, la méningite et la fièvre jaune. Ces stocks sont accessibles à tous les pays du monde, à condition que les pays à revenu élevé remboursent le coût des vaccins après utilisation.
Mais malgré leur importance stratégique, l’impact réel de ces campagnes reste encore peu documenté.
Pour y remédier, Dominic Delport, de l’Institut Burnet à Melbourne, et ses collègues ont eu recours à un type de simulation informatique appelé modèle multi-agents afin d’estimer l’efficacité des campagnes de vaccination d’urgence contre cinq grandes maladies dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, entre 2000 et 2023.
Leur étude révèle que le vaccin contre l’Ebola a permis de réduire les cas de 76 % et les décès de 77 %. Les vaccins contre la fièvre jaune ont eu l’impact le plus spectaculaire, avec une baisse de 98 % des cas et de 99 % des décès.
À partir de données réelles sur 210 flambées épidémiques de rougeole, choléra, fièvre jaune, méningite et Ebola dans 49 pays, les chercheurs ont construit des modèles spécifiques à chaque maladie. Ils ont comparé les scénarios réels à ceux d’un monde hypothétique sans vaccination d’urgence, et ont évalué les économies réalisées grâce aux infections, décès et incapacités évités.
Un impact mesurable sur le terrain
Selon les résultats publiés dans la revue BMJ Global Health, les campagnes de vaccination d’urgence ont permis, depuis 2000, d’éviter 5,81 millions d’infections, 327 000 décès et 14,6 millions d’années de vie ajustées sur l’incapacité (DALYs) – un indicateur qui mesure l’impact global d’une maladie, en prenant en compte les années perdues par décès prématuré ou par incapacité durable. Un DALY équivaut à une année de vie en bonne santé perdue.
L’étude révèle également une réduction moyenne de près de 60 % des cas de maladie, et montre que les campagnes vaccinales ont considérablement diminué le risque de flambées épidémiques majeures.
En examinant l’impact maladie par maladie, l’étude montre que le vaccin contre l’Ebola a permis de réduire les cas de 76 % et les décès de 77 %. Les vaccins contre la fièvre jaune affichent les résultats les plus spectaculaires, avec une diminution de 98 % des cas et de 99 % des décès.
La vaccination contre la rougeole en réponse aux flambées a permis de réduire les cas de 59 % et les décès de 52 %, tout en abaissant fortement le risque d’épidémies de grande ampleur. Les campagnes d’urgence contre la méningite et le choléra ont quant à elles réduit les cas respectivement de 27 % et 28 %, et les décès de 28 % et 36 %.
« La disponibilité de vaccins pour répondre aux épidémies a permis de sauver plusieurs centaines de milliers de vies depuis 2000 », soulignent les auteurs. Ils insistent aussi sur l’importance de la réactivité.
« L’élément déterminant de l’impact d’une réponse vaccinale est systématiquement apparu comme étant le délai de mise en œuvre. Plus la réponse est rapide, plus ses effets sont importants, tant sur le plan sanitaire qu’économique. »
Pour aller plus loin
Des bénéfices économiques considérables
L’étude montre également que ces campagnes de vaccination d’urgence, menées lors de 210 flambées épidémiques, ont généré près de 32 milliards de dollars américains de bénéfices économiques – principalement en évitant des décès et des maladies de longue durée.
Mais la valeur réelle pourrait être encore plus élevée, car ces estimations n’incluent pas l’ensemble des coûts liés à la mise en place des réponses aux épidémies, ni les bouleversements sociaux et économiques plus larges que peuvent entraîner les grandes épidémies.
Prenons l’exemple de la flambée d’Ebola entre 2014 et 2016 : en l’absence de vaccin à l’époque, l’épidémie a balayé l’Afrique de l’Ouest et provoqué une onde de choc mondiale, entraînant des pertes économiques estimées à 53 milliards de dollars dans la région.
« Pour la première fois, nous sommes en mesure de quantifier de manière exhaustive les bénéfices – humains et économiques – du déploiement des vaccins face à certaines des maladies infectieuses les plus meurtrières », a déclaré la Dre Sania Nishtar, Directrice générale de Gavi, également impliquée dans l’étude.
« Cette recherche démontre clairement le pouvoir des vaccins comme outil de réponse rentable face au risque croissant d’épidémies dans le monde. Elle souligne aussi l’importance de financer pleinement Gavi pour lui permettre de continuer à protéger les communautés dans les cinq années à venir. »