L’hépatite B, une épidémie silencieuse au Burkina Faso

L’hépatite B fait, sans grand bruit, des milliers de victimes chaque année au Burkina Faso. Au centre de santé Sainte Elsie, situé dans l’arrondissement 6 de Ouagadougou, l’association Santé et éducation pour tous multiplie les campagnes de vaccination pour éradiquer la maladie.

  • 9 février 2023
  • 4 min de lecture
  • par Abdel Aziz Nabaloum
L’association Santé et éducation vise l'élimination de l'hépatite d'ici 2024. Crédit : Abdel Aziz Nabaloum
L’association Santé et éducation vise l'élimination de l'hépatite d'ici 2024. Crédit : Abdel Aziz Nabaloum
 

 

Le centre de santé Sainte Elsie de l’association Santé et éducation pour tous ne désemplit pas en cette journée de janvier. Accompagné de ses trois enfants, Issiaka Sanfo ne veut pas rater « la campagne zéro hépatite » organisée par l’association. Les appels au dépistage gratuit et à la vaccination lancés par l’organisation sur les réseaux sociaux ont fini par le convaincre de la nécessité de se faire vacciner contre l’hépatite B. « Il nous faut connaitre notre sérologie pour mieux se protéger contre la maladie », lance-t-il.

En poste depuis 7 heures, l’infirmière Azana Wassongma et son binôme Mireille Dedo s’activent pour les tests de diagnostic rapide de la famille Sanfo. Tour à tour, Issiaka, Saoudata et Awa tendent leur index pour le prélèvement sanguin. Diagnostic : négatif. Aucun d’entre eux ne porte les traces du virus de l’hépatite. Séance tenante, chaque membre de la fratrie reçoit sa première dose du vaccin.

« C’est toujours bon de connaitre son statut et de se faire vacciner. Je vais aller chercher mes deux enfants pour les faire vacciner à leur tour. »

Première cause du cancer du foie au Burkina, l'hépatite B se transmet essentiellement par relations sexuelles ou par contact avec du sang infecté. Maladie silencieuse et souvent méconnue, elle cause environ 5000 décès par an, selon le ministère de la Santé. Pour contrer la maladie, la principale stratégie de prévention en vigueur est la vaccination.

Zéro hépatite d’ici 2024

C’est pourquoi Santé et éducation pour tous a une mission : « tous ensemble pour zéro hépatite d’ici 2024 ». « Au Burkina, en milieu hospitalier, on estime à 2 400 000 le nombre de personnes atteintes d’hépatite B. Chaque année, la prévalence augmente. Elle est passée de 8 à 15%. Beaucoup de personnes ignorent la maladie. Nous organisons en moyenne 10 campagnes de vaccination par an pour permettre au maximum de personnes de se faire vacciner, car la vaccination est le seul moyen de se protéger », précise Dr Janette Clémentine Cakpo, médecin généraliste membre de l’association.

Dr Janette Clémentine Cakpo
Dr Janette Clémentine Cakpo
Crédit : Abdel Aziz Nabaloum

En fin de matinée, Ousmane Ouédraogo, 45 ans, est la cinquantième personne à passer devant l’équipe médicale. Il ne regrette pas d’avoir déserté son garage d’autos-motos en cette matinée. Venu de l’arrondissement 12 de Ouagadougou, Ousmane Ouédraogo ne cache pas sa joie d’avoir été dépisté et vacciné. Le doigt bien collé au coton imbibé d’alcool, à son épaule gauche, il est désormais fier d’avoir reçu son premier vaccin. « J’ai eu quatre collègues qui ont perdu la vie à la suite de l’hépatite B. Donc je ne voudrais pas que le virus passe aussi par moi et mon entourage », raconte-t-il. Son processus d’immunisation entamé, Ousmane compte désormais s’ériger en ambassadeur de la lutte contre l’hépatite dans son entourage. « En se vaccinant, nous protégeons les autres et freinons la propagation de la maladie », reconnait le mécanicien.

Ousmane Ouédraogo a été testé négatif au virus de l’hépatite.
Ousmane Ouédraogo a été testé négatif au virus de l’hépatite.
Crédit : Abdel Aziz Nabaloum

Connaitre son statut et se faire vacciner

Dans l’après-midi, les populations des différents secteurs de Ouagadougou continuent d’affluer au centre de santé Sainte Elsie. La cour est bondée. Pas de places assises, sur les bancs. Des mères, bébé au dos, attendent leur tour pour connaitre leur sérologie.

Sila Drabo, qui tenait absolument à connaitre sa sérologie, ne souffre pas d’hépatite. Son carnet de vaccination en main, il compte aller chercher ses enfants pour les immuniser aussi. « C’est toujours bon de connaitre son statut et de se faire vacciner. Je vais aller chercher mes deux enfants pour les faire vacciner à leur tour », confie-t-il entre deux éclats de rire.

Poursuivre le schéma vaccinal

Alima Kaboré et ses filles Malika (9 ans) et Mireille (17 ans) patientent pour recevoir le résultat de leur test. « Depuis le début de la campagne, nous ne cessons de recevoir des appels. Ce sont des personnes qui cherchent l’emplacement de la clinique pour venir se faire vacciner », nous informe l’infirmière Wassongma. Déclarées négatives, elles reçoivent chacune leur dose du vaccin. Rendez-vous est pris dans un mois pour la deuxième dose, et six mois après pour recevoir la dernière dose. « Comme nous avons votre contact, nous vous appellerons quelques jours avant pour que vous veniez prendre votre deuxième dose, le 1er mars prochain », leur dit-elle.

Malika Kaboré (9 ans) a reçu sa première dose du vaccin.
La petite Malika a reçu sa première dose du vaccin.
Crédit : Abdel Aziz Nabaloum

Heureuse de la mobilisation, Dr Cakpo confie : « Pour la première campagne de l’année qui s’est déroulée simultanément dans les villes de Ouagadougou, Banfora, Koudougou et Bobo-Dioulasso, nous avons dépisté et vacciné près de 500 personnes ». D’après Dr Cakpo, l’objectif était d’apporter l’information et de protéger la population. A cet effet, dit-elle, l’association santé et éducation pour tous ne baissera pas les bras dans le combat qu’elle mène pour éradiquer l’hépatite B du Burkina.

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