Clarise Loe Loumou

Dr. Clarisse Loe Loumou, pédiatre, et membre du Comité de Pilotage de l’Assemblée des organisations de la société civile (OSC) partenaires de GAVI Alliance.

Jeudi
27 mars
2014
Centre d'information Alternative santé

Centre d'information Alternative santé, Cameroun.

Du temps où j’étais pédiatre en charge des gastro entérites et de la malnutrition au Centre Mère et Enfant à Yaoundé – l’un des plus gros centre pédiatrique de la ville et même du Cameroun – les diarrhées sévères et mortelles faisaient partie de mon quotidien. Car dans mon pays, le Cameroun, la diarrhée est l’une des principales causes de mortalité chez les enfants de moins cinq. Le rotavirus, plus communément appelé « la gastro », tue chaque année plus de 5 800 enfants camerounais de moins de cinq ans. C’est donc une grande nouvelle pour mon pays que le vaccin soit enfin introduit dans notre programme national de vaccination !

Le rotavirus : c’est une vieille histoire pour nous au Cameroun…et une maladie qui a malheureusement déjà fait beaucoup de dégâts. Plus de 15 ans se sont écoulés depuis les premières études de 1995 qui montraient le caractère prévalent du rotavirus1 dans les diarrhées, ce qu’a confirmé quelques années plus tard, la surveillance du rotavirus conduite par l’Organisation mondiale de la santé avec le Dr Njiki Kinkela2. Cela explique qu'il y a trois ans, le blog que j’avais rédigé à l'occasion de l’agrément pour l'introduction du vaccin contre le rotavirus au Cameroun, se terminait à la fois sur une note d'espoir – attendant avec empressement l'introduction prochaine du vaccin – et sur une note de désespoir face aux milliers d’enfants qui succomberont injustement des suites de diarrhées à rotavirus dans l’attente. Aujourd’hui, nos enfants n’ont plus besoin d’attendre: le vaccin antirotavirus est enfin là.

Avec ce nouveau vaccin, nous faisons un pas important vers la baisse de la morbidité et de la mortalité infantile dans notre pays. Nous le devons bien sûr à une volonté politique forte et constante, et surtout à l'implication directe du Ministre de la Santé et du Programme élargi de Vaccination (PEV) pour tenir les engagements nécessaires à l'introduction de ce vaccin.. N’oublions pas que tout ceci n'aurait pu se faire sans le soutien des bailleurs, par le biais de GAVI Alliance, dont la prochaine réunion de collecte de fonds sera cruciale pour nos pays.

La société civile se doit d'emmener le message au plus près des communautés, pour être en droite ligne avec le Plan d'Action Mondial pour la Vaccination (GVAP) qui exige l'appropriation de la vaccination par les communautés dans le but d'arriver à une couverture efficace et optimale. Nous sommes prêts à agir dans ce sens via la plate-forme PROVARESSC (forum pour la PROmotion de la VAccination et le REnforcement du Système de Santé au Cameroun), qui appuie déjà le PEV depuis plusieurs mois dans la mobilisation sociale et la communication, t particulièrement lors des campagnes contre la polio.

Le Cameroun possède déjà des personnalités très engagées pour rendre visible et effectif le positionnement de la vaccination dans l'agenda politique, tels le député Amougou Mezang ou encore notre collègue pédiatre Dr Ngosso Tetanye, champions de la vaccination, qui appuient efficacement les messages diffusés par la société civile. D’ailleurs, le prochain Congrès de l'UNAPSA (Union des Sociétés et Associations Pédiatriques Africaines) qui se tiendra en Novembre 2014 sous Présidence Camerounaise sera une nouvelle occasion de rappeler l’importance de la vaccination et l'urgence qu'il y a à rassembler les efforts.

Car beaucoup reste encore à faire. Notre pays traverse une zone de turbulence avec la chute de la couverture vaccinale, des résultats inégaux entre les districts et les villes et surtout, la récente apparition du virus de la polio. Il faut continuer les efforts de vaccination. L'introduction du vaccin contre le rotavirus ne doit pas être une nouvelle occasion manquée de rebooster notre programme de routine en marge des campagnes régulières. Il n'est pas question de s'endormir, il faut renforcer les efforts pour promouvoir la vaccination ! Nous avons maintenant tous les outils.


1. Cent Afr J Med. 1995 Mar;41(3):91-4. Prevalence of Campylobacter enteritis in children from Yaounde (Cameroon). Koulla-Shiro S, Loe C, Ekoe T.

2. Pédiatre CME/FCB Yaoundé Cameroun

 

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