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Les superbactéries résistantes aux médicaments pourraient tuer 39 millions de personnes d’ici 2050, avertit une étude du Lancet

La résistance aux antimicrobiens s’annonce comme l’une des plus grandes menaces pour la santé mondiale. Les vaccins figurent parmi nos meilleurs outils pour éviter cette catastrophe.

  • 23 septembre 2024
  • 4 min de lecture
  • par Priya Joi
Une mère et son enfant attendent le vaccin contre le paludisme en Côte d'Ivoire. Crédit : Gavi/2024/Miléquêm Diarassouba
Une mère et son enfant attendent le vaccin contre le paludisme en Côte d'Ivoire. Crédit : Gavi/2024/Miléquêm Diarassouba
 

 

Une étude publiée cette semaine dans The Lancet révèle qu'entre 1990 et 2021, plus d’un million de personnes mouraient chaque année dans le monde à cause de la résistance aux antimicrobiens (RAM). Elle prévoit une hausse alarmante du nombre de décès d’ici 2050 par rapport à 2022. Trente-neuf millions de décès devraient être directement attribuables à la RAM, tandis que 169 millions de décès seront associés à cette résistance.

Il y a néanmoins une note d’espoir : au cours des 30 dernières années, les décès dus à la RAM chez les enfants ont diminué de moitié grâce à un meilleur accès aux vaccins.

« Ces résultats soulignent que la RAM constitue une menace majeure pour la santé mondiale depuis des décennies et que cette menace ne fait qu’augmenter », a déclaré le Dr Mohsen Naghavi, auteur de l’étude et responsable de la recherche sur la RAM à l’Institute of Health Metrics (IHME) de l’Université de Washington, aux États-Unis.

Cette étude est la première analyse approfondie des impacts de la résistance aux antimicrobiens sur la santé mondiale. Réalisée par une vaste équipe de chercheurs dans le cadre du projet mondial de recherche sur la RAM, elle est aussi la première à analyser les tendances mondiales de cette résistance.

« Une des principales raisons pour lesquelles moins d’enfants meurent de la RAM est le succès des campagnes de vaccination, notamment le vaccin polyvalent contre la pneumonie à streptocoques »

- Dre Gisela Robles Aguilar, autrice de l’étude et chercheuse principale sur la charge mondiale de morbidité au département de médecine Nuffield de l’université d’Oxford

Les données de 1990 à 2021 montrent une résistance croissante aux antimicrobiens essentiels, affectant presque tous les agents pathogènes majeurs que l'OMS considère parmi les plus difficiles à traiter. Cela a conduit à plus de décès en 2022 qu’en 1990.

L’étude a analysé 520 millions d’ensembles de données, notamment des dossiers de sortie d’hôpital, des demandes d’indemnisation et des certificats de décès de 204 pays. Entre 1990 et 2021, les décès dus à la RAM chez les enfants de moins de cinq ans ont baissé de 50 %, tandis que ceux des personnes de plus de 70 ans ont augmenté de plus de 80 %.

« Une des principales raisons pour lesquelles moins d’enfants meurent de la RAM est le succès des campagnes de vaccination, notamment le vaccin polyvalent contre la pneumonie à streptocoques », a expliqué la Dre Gisela Robles Aguilar, autrice de l’étude et chercheuse principale sur la charge mondiale de morbidité au département de médecine Nuffield de l’université d’Oxford, dans un entretien avec VaccinesWork.

À l’avenir, les chercheurs prévoient que le nombre de décès les plus élevés sera en Asie du Sud, alors que, jusqu’à présent, l'Afrique subsaharienne enregistre le plus grand nombre de morts dues à la RAM.

Ce changement s’explique, selon la Dre Robles Aguilar, par le fait que les décès liés à la RAM chez les enfants de moins de cinq ans devraient diminuer de moitié d’ici 2050 dans le monde, tandis que les décès chez les personnes de plus de 70 ans devraient doubler. « La population d'Afrique subsaharienne restera relativement jeune comparée à celle de l’Asie, où le vieillissement de la population entraînera une exposition accrue à la RAM. »

La capacité des agents pathogènes mortels à résister aux traitements conçus pour les éliminer représente depuis longtemps un défi. Toutefois, les progrès pour contrer cette résistance sont freinés par la complexité des facteurs en jeu.

L’utilisation excessive ou inappropriée des antibiotiques (comme l'interruption d’un traitement avant son terme) est l’un des facteurs clés de la RAM. De plus, les antimicrobiens sont souvent employés de manière inconsidérée pour prévenir et traiter les infections chez les animaux d’élevage, et les déchets issus de la production de médicaments peuvent polluer l’environnement.

Cela nécessitera une collaboration étroite entre les acteurs de la santé humaine, animale et environnementale, affirment les chercheurs. Ils soulignent que les vaccins restent un pilier essentiel dans la lutte contre la RAM : « Tout d’abord, en prévenant les infections, on élimine toute possibilité que la résistance ait un impact sur la santé. Ensuite, la prévention des infections, même sensibles aux antibiotiques, réduit le nombre de personnes recevant des traitements antibiotiques, diminuant ainsi la pression de sélection pour les bactéries résistantes. »

Des pathogènes tels qu’Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae disposent de vaccins candidats en phase avancée d’essais cliniques, ce qui laisse espérer l’arrivée prochaine d’un vaccin contre ces agents, selon la Dre Robles Aguilar. Cependant, elle précise qu’« il existe d’autres bactéries mortelles, comme le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), pour lesquelles il n’y a pas encore de vaccin candidat avancé. Étant donné que les personnes âgées sont particulièrement à risque de contracter cette bactérie à l’hôpital, un vaccin est nécessaire de toute urgence. »