« Sans la vaccination, nous serions débordés » : Comment le vaccin RTS,S transforme la lutte contre le paludisme au Burkina Faso

Introduit le 5 février 2024 dans le Programme élargi de vaccination (PEV) au Burkina Faso, le vaccin antipaludique RTS,S donne des résultats remarquables. Grâce à la vaccination, dans les régions des Cascades et du Sud-Ouest, zones à forte prévalence du paludisme, le fardeau s'allège sur les enfants de moins de 5 ans.

  • 24 septembre 2024
  • 5 min de lecture
  • par Abdel Aziz Nabaloum
Un bébé reçoit le vaccin antipaludique lors de l'introduction du vaccin contre le paludisme dans la vaccination de routine au Burkina Faso le 5 février 2024. Crédit : Gavi/2024/Arnauld Yalgwueogo
Un bébé reçoit le vaccin antipaludique lors de l'introduction du vaccin contre le paludisme dans la vaccination de routine au Burkina Faso le 5 février 2024. Crédit : Gavi/2024/Arnauld Yalgwueogo
 

 

Résidente du secteur 1 de Gaoua (région du Sud-Ouest), Evelyne Palé arbore un sourire radieux. Sa fille Jacqueline, âgée de 3 ans, n'a montré aucun signe de la maladie, malgré la période de pic du paludisme. Quel est le secret ? Evelyne Palé est convaincue que les trois doses du vaccin RTS,S, administrées à sa fille, ont renforcé son immunité, la protégeant ainsi de la maladie. « Je suis très heureuse que ma fille ait reçu ses trois doses du vaccin. Chaque année, à cette période, elle attrapait le paludisme. Mais avec les doses qu’elle a reçues, elle est en bonne santé », témoigne-t-elle avec joie.

« Je n'ai jamais eu de doute sur l’efficacité du vaccin. La preuve : dans mon entourage, tous les enfants vaccinés sont en pleine forme. Je souhaite que tous les enfants du Burkina soient protégés en recevant le vaccin », espère-t-elle.

Dans la famille Ouédraogo, au secteur 3 de Banfora, dans la région des Cascades, la joie est encore plus immense. Les crises de paludisme entre juillet et septembre sont désormais un lointain souvenir. Aucun signe de la maladie chez les enfants de la cour. « Ici, nous avons deux enfants de moins de 5 ans qui ont tous reçu le RTS,S. Jusqu’à ce jour, aucun d’eux n’a attrapé le paludisme. Nous en sommes très contents », déclare fièrement Mariam Traoré, leur mère.

Un enfant et sa mère lors du lancement de la vaccination systématique contre le paludisme.
Crédit : Gavi/2024/Arnauld Yalgwueogo 

Dès l’introduction du RTS,S dans le PEV, la famille Ouédraogo n'a pas hésité à faire vacciner ses enfants. Le résultat est sans appel : « Aucun d’eux n’a attrapé la maladie, contrairement aux autres années. Ce vaccin a vraiment révolutionné la santé de mes enfants. Il est important que tous les parents fassent confiance aux chercheurs qui nous ont fourni ce bon vaccin ».

Tendance baissière

En 2022, le Burkina Faso a enregistré 11 656 675 cas de paludisme, dont 539 488 cas graves, avec malheureusement 4 243 décès, parmi lesquels 2 925 enfants de moins de 5 ans. Dans les régions des Cascades et du Sud-Ouest, les taux de prévalence sont parmi les plus élevés du pays, à respectivement 13 % et 39 %.

Soroganga Da, attaché de santé en soins infirmiers et obstétricaux et coordonnateur du Centre médical urbain (CMU) de Gaoua, indique que depuis l’introduction du RTS,S dans la vaccination de routine, les cas de paludisme sont en nette diminution. « À la semaine 36, chez les enfants de moins de 5 ans, nous n’avions que 113 cas de paludisme simple, 4 cas graves et aucun décès. Les années précédentes, les cas étaient bien plus nombreux. Je pense que la vaccination a joué un grand rôle dans cette baisse », se réjouit-il. Selon la direction régionale de la santé du Sud-Ouest, de février à août 2024, près de 40 000 doses ont été administrées aux enfants.

« À la date du 10 septembre, nous n’avions qu’un seul cas de paludisme grave. L’effet du vaccin est vraiment remarquable. »

- Abdoulaye Soma, chef de poste du Centre de Santé et de Promotion Sociale de Nofana

Conséquence directe : au centre médical du secteur 2 de Gaoua, comme dans de nombreux autres centres, les enfants souffrant de paludisme se font rares. « Depuis l’introduction du vaccin, la prise en charge des enfants s’est beaucoup améliorée. Nous avons moins de cas dans notre centre. Les parents ont compris que vacciner leur enfant est crucial pour éviter la maladie », affirme le Dr David Napon.

Pour aller plus loin

Le paludisme, longtemps le principal motif de consultation, d'hospitalisation et de décès dans la région des Cascades, est en recul. « Au premier semestre 2023, nous avions enregistré plus de 129 000 consultations. Cette année, au premier semestre, nous en avons eu 94 000. Pour les cas de paludisme grave, nous en avions 5 800 au premier semestre 2023, contre 5 400 au premier semestre 2024. Les taux de létalité ont baissé, passant de 3,28 % au premier semestre 2023 à 0,3 % en 2024. Cette diminution est due aux actions de prévention, notamment la vaccination des enfants », explique le Dr Wendkuni Ouédraogo, directeur régional de la santé des Cascades.

Selon le Dr Ouédraogo, la vaccination est l'une des principales stratégies ayant contribué à la baisse de la létalité dans la région des Cascades. « Nous faisons partie des districts sanitaires sélectionnés pour la vaccination. Nous profitons des campagnes de chimio-prévention du paludisme saisonnier (CPS) pour identifier les enfants cibles et les vacciner. Nous visons à atteindre un taux de couverture de 90 % pour la 3e dose du RTS,S, et nous sommes actuellement à 75 %. Nous sommes sur la bonne voie. »

Dr David Napon, médecin au centre médical du secteur 2 de Gaoua, confirme que plusieurs stratégies ont été adoptées pour combattre le paludisme, comme la CPS, la distribution de moustiquaires et la destruction des gîtes larvaires. « Depuis l’introduction du vaccin, les chiffres s’améliorent. Lorsque les populations adhèrent à cette stratégie, cela se ressent au niveau des centres de santé. Sans la vaccination, nous serions débordés », insiste-t-il.

Combattre les fausses informations

Pauline Kazienga fait partie des nombreuses femmes qui ont ignoré les rumeurs sur le RTS,S. Elle est heureuse que sa fillette Awa, âgée de 2 ans, n’ait pas contracté le paludisme. « Depuis que mon enfant participe à la campagne de vaccination, elle ne tombe plus malade. D’autres parents refusent de vacciner leurs enfants à cause de fausses informations, mais je les invite à adhérer au vaccin sans crainte. Mon enfant ne tombe pas malade, contrairement à ceux qui n’ont pas été vaccinés », témoigne-t-elle.

Abdoulaye Soma, chef de poste du Centre de Santé et de Promotion Sociale de Nofana, dans les Cascades, souligne que le vaccin est bien accueilli par les parents. « À la date du 10 septembre, nous n’avions qu’un seul cas de paludisme grave. L’effet du vaccin est vraiment remarquable », salue-t-il.

Malgré ces résultats positifs, le Dr Bakary Traoré, directeur régional de la santé du Sud-Ouest, estime qu’il reste des obstacles à surmonter, notamment les fausses croyances et la désinformation. « Certaines personnes ne croient toujours pas que le paludisme est transmis par les moustiques. Le véritable défi reste la gestion des rumeurs », regrette-t-il.


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